L’adresse n’a pas été trouvé… Erreur, « 404 not Found » est adroit pour un premier roman. Hervé Decca, ancien prof dans un lycée de la banlieue parisienne nous dépeint avec justesse un lycée où l’équipe pédagogique hésite entre désespoir, conscience professionnelle et utopie de hussard noir, une cité des années 60′ en guerre avec celle, identique, qui se trouve de l’autre côté du pont, un commissariat de quartier avec ses quatre flics qui sont tous sauf fantastiques… Une image réaliste d’une banlieue d’aujourd’hui, enfin de 2005, mais peu de choses a évolué depuis. Un très bon bouquin, avec un style plaisant qui évite les clichés et parvient à rendre avec force le langage de la banlieue, entre mots crus et belles phrases, entre petit trafiquant et prof de français.
Hervé Decca a su dans « 404 not Found » évoquer la banlieue, son histoire, son hypothétique avenir fait de renouvellement urbain, sans la caricaturer, à la manière d’un Bourdieu. On se plonge donc avec facilité et sans appréhension dans l’histoire des personnages de « 404 not Found », l’adolescente Lila qui veut s’en sortir malgré ses frères, Daniel enfant qui vit ses rêves, Hicham qui ne sera jamais footballeur, Mme Castelli qui prodigue avec sérénité le respect du français, la proviseur Nagy qui tient le cap, Dorothée la flic féministe, Bonnal la caricature de flic raciste bas du front, Karim le brillant informaticien et leur le chef de section qui cherche à devenir commissaire pour éviter le naufrage de son ménage.
L’histoire part de la fugue d’une adolescente et peu à peu se tissent les fils de l’univers de la banlieue, sa violence, mais surtout ses envies, ses désirs, son ennui et son optimisme malgré tout. « 404 not Found » est captivant par le labyrinthe dans lequel chacun s’enferme en espérant obtenir ce que l’autre détient ou lui vole : sa part de liberté.
La seule limite de ce roman, vraiment plaisant à lire, enrichissant et distrayant est que ce n’est pas un vrai polar. Il a l’intrigue d’un polar, avec une enquête, l’atmosphère d’un polar avec le détail de la société et de son environnement, la violence apportée par la banlieue de 2005 et la manière dont un célèbre ministre de l’intérieur encourageait à coup d’images, de mépris et de paroles incendiaires… Mais la violence n’est pas issue des moments clés du roman, plus une violence appartenant à l’environnement. Un polar « dry », léger, mais il est clair que Decca est un bon auteur et que son prochain opus, s’il parvient à dépasser sa peur d’effrayer, devrait rencontrer autant de succès que « 404 not Found ».
Hervé Decca – « 404 not Found » – Actes Sud 2012