Guillermo Arriaga, brillant scénariste des « Amours chiennes », « 21 grammes », « Babel »… est d’abord un chilango, un mexicain de Mexico, un enfant d’un quartier populaire d’une des plus vastes mégapoles mondiales et chacun de ses écrits nous crache cette vérité à la figure, il vaut mieux naître riche, bien portant et… que l’inverse. Guillermo Arriaga écrit du roman noir comme il respire. Une œuvre très littéraire, très sombre, qui nous brasse pas mal. Après avoir lu « Mexico, quartier sud », somme de nouvelles noires, descriptives et émotives, j’ai lu « Le bison de la nuit », une histoire d’amitié et d’amour. Deux options pour parler de ce court roman percutant. Manuel aime Guillermo et Tania, dont Guillermo est aussi amoureux et Tania le leur rend bien… Rebecca est amoureuse de Manuel et Margarita aussi, un peu… une sorte de telenovela où une chanson de l’immense Catherine Ringer, penserez-vous, si l’on en reste là.
Guillermo et Manuel sont liés par un pacte d’amitié. Parce que cette amitié vacille sous les joutes des premières amours, la folie guette Guillermo jusqu’à son suicide. À partir de ce moment, de cette folie destructrice, les sentiments exacerbés des jeunes gens vont noircir l’atmosphère de ce roman. Le mort sera on ne peut plus présent et vivant, estomaquant d’audace et bouleversant. La nuit emporte chacun dans ses dérives sentimentales, où tous se cherchent en fuyant les autres, en parcourant les rues de Mexico, en se jetant dans les bras d’une autre, en traînant son mal de vivre au zoo ou au motel… on est trop sérieux quand on a vingt ans.
La vie est courte nous assène Arriaga et les sensations les plus fortes sont celles de notre jeunesse. Un condensé de noir, une écriture précise, une histoire banale et très forte, une folie à laquelle personne n’échappe.
Guillermo Arriaga – « Le bison de la nuit » – Phoebus 2005, Points 2010