J’avais raté « Pike » de Benjamin Whitmer… heureusement, la nouvelle collection Néonoir de Gallmeister m’a permis de combler cette lacune et de découvrir le dernier roman de Whitmer, « Cry Father« . Résultat : deux claques prises coup sur coup et même pas mal, que du bonheur, même si le mot est peut-être galvaudé parlant de romans noirs… anthracites ! Je ne reviens pas sur « Pike« , le roman étant sorti depuis 3 ans, mais parlerai d’une certaine constance dans la thématique au lu de « Cry Father« . Encore une question de paternité mal assumée, une histoire d’enfant mort, une dépression du « héros » liée à son histoire de père privé de son enfant. Encore une histoire de toxicos, des délaissés du « way of life » états-unien, des privés de tout, des carencés en sentiments, du moins dans leurs expressions. « Cry Father » nous narre la vie de Patterson Wells, ours meurtri, condamné aux travaux de solitaire pour survivre, qui se réfugie entre deux tafs nourriciers dans sa cabane au fond des bois où son plus proche voisin est un azimuté apocalyptique. Le-dit voisin et ami, Henry a quelque mal avec son fils, Junior, constamment chargé et chargé du ravitaillement en drogues des zones urbaines alentour (Denver). Patterson va se rapprocher de Junior. Peu à peu, on découvre au fil des pages l’ex de Patterson, l’ex de Junior, les dealers hispaniques… toute une communauté de paumés qui prouve que même dans les lieux les plus ruraux des États-Unis, la misère engendre les trafics aussi rapidement qu’à Cincinnati (cf. « Pike« ). Plus Patterson tente de s’accrocher à sa nouvelle « paternité » avec Junior, personnage autant borderline que sympathique, plus la violence induite forcit jusqu’à l’implosion finale.
Somme toute, une histoire assez banale oscillant entre dénonciation des affres de notre société et repentance personnelle du héros, sauf que… l’histoire reste immorale, très noire et surtout le style de Whitmer, concis tout en étant descriptif, nous joue une petite musique digne d’une grande partition. Sur le plan littéraire, pas de doute, cela fait partie des excellents romans et Whitmer, en deux romans entre parmi les plus grands du noir. Un vrai plaisir d’écouter Benjamin Whitmer qui a déjà donné beaucoup dans sa jeune œuvre noire et lumineuse.
Benjamin Whitmer – Cry Father – Gallmeister 2015
Ce remarquable écrivain a déjà deux excellents romans à son actif, chapeau !