Ned Crabb, auteur du farfelu « La bouffe est chouette à Fatchakulla » revient en force avec « Meurtres à Willow pond« . Portraitiste acéré de ses contemporains, il nous emmène au bord d’un de ces nombreux lacs du Maine, à quelques pas du Canada, au milieu de forêts de pins et de chênes, dans un lodge majestueux où fraye une palanquée de pêcheurs. À la tête du somptueux lodge, Iphigene Seldon, 77 ans, mène la barque comme une tenancière haute en couleurs. À ses côtés, ses neveux et nièces participent aux activités du lodge tout en attendant assez impatiemment le décès de la vieille dame pour récupérer quelques millions de dollars… Brad, alcoolique et sa sœur Merrill, cocaïnomane avérée, sont deux des meilleurs guides de pêche du Maine et emmènent chaque jour les clients du lodge sur Willow Pond, le lac attenant. Kipper, le dernier de la fratrie s’occupe de la gestion et du cuisinier et tous trois haïssent avec enthousiasme leur tante. À la veille de revoir son testament, cette dernière invitent ses cousins, deux sexagénaires hédonistes, dont l’équilibre repose sur le sexe, la pêche et les livres, pour avoir des amis et des appuis proches lors de cette opération. Le tableau est complété par les ex de Brad, une pouffe de 45 ans, et de Merrill, un escroc bellâtre, un couple d’anglais barrés et deux mystérieux personnages parmi les clients du lodge. L’intrigue démarre ainsi, par cette réunion de famille au milieu d’un décor somptueux, quasi identique à celui de William G. Tapply (« Casco Bay« , « Dérive sanglante« , « Dark tiger« ), une intrigue assez bonhomme, entre sourires fréquents et crise de rire devant le trait caricatural de chacun… et puis, au plus fort de la tempête, tous les éléments se déchaînent, qu’ils soient externes ou internes au lodge. Crabb envoie du lourd, ça dégomme dans tous les sens, les caractères se révèlent, derrière un vieil amant cacochyme et un alcoolo invétéré vont apparaître des héros, le tout avec le sourire ou le fou-rire. Un excellent polar, qui plaira autant aux aficionados d’Agatha Christie qu’à ceux de Jerry Stahl. Un polar mené comme une partie de pêche, avec de la patience, de beaux appâts. un ferrage à l’instant t et une belle bataille pour ramener la prise. Je ne sais si Gallmeister va nous dégoter un 3ème opus du sieur Crabb, mais quel plaisir de lire cet auteur !
Comme le dit JB.Pouy, ce Crabb pince très fort.
Pour les passionnés de géographie et d’anecdotes, Crabb nous emmène aux bords de lacs existants, en particulier d’un qu’il connaît bien car il y vit une partie de l’année (dont il a modifié les noms), mais vous retrouverez bien des traces réelles à proximité de la 225 non loin de la 27, au croisement desquelles vous trouverez Rome (car tous les chemins y mènent). Tout cela pour dire que le décor est bien réel, même la Serpentine existe, reliant les deux lacs bien connus de Crabb, de là à imaginer qu’il se prenne pour Six Godwin, il n’y a qu’un pas à franchir…
Ned Crabb – Meurtres à Willow Pond – Gallmeister 2016
J’ai adoré ce livre, c’est une super chronique ! 🙂
J’aime tellement cette maison d’édition que j’ai créé un groupe facebook pour fêter leur 10 ans, vous êtes la bienvenue 🙂