Olivier Truc nous embarque dans la cosmogonie et les légendes sami avec « Le dernier Lapon ». Un conte noir, où l’espoir n’existe pas, où se dessine la fin d’un peuple, la fin des peuples au nom de l’exploitation des dernières ressources de la planète. Cela commence de nuit, dans la nuit polaire, celle qui dure quatre semaines, pendant lesquelles les scandinaves dépriment, les Sami continuent à vivre au rythme de leurs traditions et de l’élevage de rennes. Un tambour sami est dérobé. Ce tambour, comme tous les tambours sami racontent une histoire. Une histoire terrible vieille de plusieurs décennies qui renaît avec la recherche de minerais précieux générant de nouveau un conflit entre le peuple sami et les colonisateurs. Olivier Truc nous permet de connaître les Sami, qui, à l’instar des Inuit, des Tchouktches, des Yupik, luttent pour préserver leur environnement et leur mode de vie nomade. Leurs territoires sont convoités par les européens depuis des siècles, car le sous-sol inexploité recèle de minerais précieux. Cette lutte qui se poursuit aujourd’hui en Scandinavie, en Russie et au Canada montre la petitesse de l’homme face aux intérêts macro-économiques. « Le dernier Lapon » est un excellent polar polaire où le jour se fait peu à peu, au rythme de l’été arctique qui renaît chaque année. On y découvre les joïk (chants traditionnels sami), la dureté de la colonisation protestante, la beauté des paysages de toundra, le climat acéré, la police des rennes, rare police transnationale qui gère les conflits entre éleveurs de rennes, mais surtout on vit au cœur des derniers Sami, un peuple qui ne connaît pas la guerre mais qui la subit. L’intrigue est complexe et se déroule sur plusieurs décennies, les mœurs conquérantes de l’homme blanc, l’alcoolisme, la pédophilie, l’adoration d’un dieu vengeur… sont froidement exprimées et donnent le tempo à ce roman réaliste, noir comme une nuit sans lune. Un premier roman qui est une réussite.
Olivier Truc – Le dernier Lapon – Métailié 2012