« Comme un carré de ciel bleu » – jeudi 19 juin 20h30
Les jours passent. Les nuits passent. Je marche de la fenêtre à la porte. Mon voisin fait de même. Cent pas nu-pieds. J’entends ses talons résonner sur le carrelage. Solitude des sentinelles dont l’espérance meurt à petit feu. A peine un reflet dans la vitre. Presque rien…
Ici, on tue pour que dalle. Pour cette comédie trompeuse derrière les barreaux. Pour le seul cinoche des jours vains. Tel est notre album de famille. Dehors, vous avez gravé les images de vos vacances en Italie, de votre première communion, de vos commémorations. Ici nous gardons en mémoire les bagarres. Le sang. Les rancœurs à n’en plus finir. Les mots qui dépassent les mots. Les peines incompressibles. Les transferts disciplinaires. Les soirs de lutte bras dessus bras dessous. Les rires et la fraternité malgré tout. La poussière du temps… Et son rien qui se conjugue à tous les temps et en toute saison. Enfin, cette vie obligatoire, presque éternelle, avec nos congénères.
« Comme un carré de ciel bleu » est un spectacle pour deux interprètes entre voix et musique, orchestré par Arnaud Chevalier, qui se propose de présenter par une mise en voix et en musique les Chroniques carcérales (2004-2007) de Jean-Marc Rouillan, parues initialement dans le journal engagé CQFD (Ce Qu’il Faut Détruire). Il s’agit de faire circuler la réalité portée par ce texte, qui dévoile la condition prisonnière depuis les centrales de France. Sur trois années, c’est de cinq prisons que l’auteur nous rapporte la vie intestine ; on y voit les intrigues, les embrouilles et les revers judiciaires dans lesquels les prisonniers endurent leur peine. Sans manquer d’humour pour les scénarios aberrants conduits par la logique carcérale, sans oublier de dépeindre les moments de solidarité que suscite la précarité. Comme le dit Rouillan c’est un «monde du dedans» qui s’oppose à notre univers d’hommes «libres», un micro-système au sein du judiciaire où la loi tient lieu de métronome.
Magali Berruet et Stéphanie Soeur installent la problématique carcérale au centre du débat auquel tend la lecture. Avec l’énergie de leurs paroles et au son de l’accordéon, elles donnent à entendre, avec une minutie généreuse, l’univers pénitentiaire dépeint par Jean-Marc Rouillan. Elles créent un trait d’union entre le spectateur et le texte.
Jeudi 19 juin 20h30. il est prudent de réserver au 09.73.65.41.38